Un joli mois de mai pour notre arrivée, une journée si belle… Des bourgeons et des arbres fleuris, des visages différents de gens du monde entier… La fête battait son plein et les fanfares et autres majorettes perpétuaient une tradition qui se renouvelle tous les ans à la même date. C’était un jour férié, une date qui célèbre la fin de la guerre et la sainte patronne de la ville, Jeanne la Pucelle.
Dans ce quartier, je vis des arabes, des turcs, des berbères, des asiatiques, des africains, des antillais, des portugais, des espagnols, des pieds-noirs… En somme la planète toute entière dans un seul quartier.
Peut-être que le destin avait-il décidé de réunir, là tous ces différents peuples du monde pour qu’ils puissent se rencontrer et se connaître. Peut être que la « Rencontre » devait se produire sur ces lieux encore inconnus pour nous ? Même le nom du quartier, où j’allais dorénavant habiter, « La Source », était tout un symbole.
Le quartier de La Source construit au milieu du XXe siècle, devait palier au retour des pieds-noirs après l’indépendance de l’Algérie, mais aussi former « la ville de demain » concrétisant le rêve des constructions d’après guerre, un véritable laboratoire à cœur ouvert.
Il fallait donc des logements bon marché pouvant contenir un nombre élevé d’ouvriers et des appartements plus chers qui étaient, eux, destinés aux fonctionnaires du centre de tri postal, le deuxième de France de par le nombre de ses employés. Et, enfin de grandes demeures achetées jadis aux paysans du coin, par les scientifiques, médecins et autres chercheurs ou professeurs. Tout ceci entouré de verdure.
Un mois de mai en France, donc, qui allait se prolonger avec l’été, saison propice à la découverte et aux longues promenades autour des lacs et espaces verts des alentours. L’envie de découvrir une nouvelle terre et un nouveau territoire allait m’emmener jusqu’à parfois chaparder dans les arbres fruitiers, à l’intérieur même des demeures. Chose que n’appréciaient pas particulièrement les propriétaires.
Nous l’avions échappée belle à maintes reprises, mes nouveaux copains et moi, et avions manqué de remplir les pages de faits divers du Canard local. Car, en volant autrui on ne pouvait que récolter la tempête. En l’occurrence ce furent des coups de fusils en guise de foudre que nous réservait parfois un paysan ou bien un propriétaire. C’est qu’ils sont chasseurs les solognots.
Les jours passent et je ne reconnais plus l’endroit où j’ai jadis vécu. Dorénavant, le quartier où j’ai grandi s’est mué en ville. Adieu le petit village noyé dans la Sologne, adieu les vertes prairies. La maison prés de la fontaine n’est plus, à sa place se trouve un hypermarché…